François Cheng (dans son livre sur Shitao) nous rappelle que Le monde n’existe que dans la mesure où il se confie à nous ; et nous ne parvenons à exister, si peu que ce soit, qu’aux heures où nous acceptons de nous confier à lui.
Nous sommes, sous toutes ses formes singulières, l’herbage du monde : les herbes infiniment renouvelées défiant les ciels noirs de l’hiver, les tempêtes et les gels. Les herbes qui tètent la lumière. Que l’esprit s’y glisse et nous devenons le pâturage du monde qui ne cesse de s’éveiller.
Ce septième recueil invite à voir le monde comme neuf.
Il sera accompagné par Anne Garel
Affaire de maçonnerie subtile
Il te faut user du fil à plomb et du souffle
Pour édifier la tour
Et d’abord creuser les fondations de l’essor
Dans le bassin des fesses et des hanches
Où trouver une force vivante
Le souffle émerge au sommet de la tête
Tombe jusqu’au périnée le fil à plomb
Qui dévoile la justesse de l’architecte
Respire par la tête et par l’anus
Par les dents et par les ongles
Par la plante des pieds par la paume des mains
Avant tout sois respiré par les reins
La porte de la vie ouvre à la voie du ciel
C’est par lui que tu seras comme tu dois être
Ne néglige pas le mandat céleste
Les deux reins sont les ailes d’un ange
Abritant la cabane où tu t’assieds
Dans l’épaisseur du silence
Le bienheureux perd ses eaux
Pour accoucher d’un monde inconnu
Tout neuf et sans repères
Ce nourrisson donne plaisir au cœur
Et joie au visage
Tu berces sans bouger cet enfançon immense
Un mystère au ventre bien plus grand que le tien
Qui te fait naître à toi-même